Cité
du Vatican,13 septembre 2014 (VIS). A l'occasion du premier
centenaire de la grande guerre, le Pape a célébré une messe au
mémorial militaire italien de Redipuglia (au Frioul). Arrivé du
Vatican en hélicoptère vers 9 h, il s'est aussitôt rendu par le
route au cimetière militaire de Fogliano di Redipuglia où reposent
14.550 soldats austro-hongrois "unis dans la mort comme dans la
vie". Il a déposé une couronne sur le monument central
abritant les restes de 7.000 soldats anonymes. Puis il a gagné le
pied du Sei Busi, montagne disputée au début du conflit, pour
visiter le cimetière monumental italien de Redipuglia où reposent
plus de 100.000 soldats tombés au front. Au centre se trouve le
tombeau du prince Emanuele de Savoie-Aoste, commandant de la III
Armée, inauguré en 1938 en présence de 50.000 vétérans de la
première guerre mondiale.
A
l'homélie de la messe, reprenant la première lecture du jour qui
rapporte le meurtre d'Abel, le Saint-Père a condamné l'indifférence
face à la guerre: Admirant la beauté de ce paysage, a-t-il dit, en
ces lieux où des hommes et des femmes travaillent, où les enfants
jouent et où les personnes âgées rêvent, je ne peux que dire: La
guerre est une folie. Alors que Dieu dirige sa création, et que nous
les hommes, nous sommes appelés à collaborer à son œuvre, la
guerre détruit. Elle détruit aussi ce que Dieu a créé de plus
beau, l’être humain. La guerre défigure tout, même le lien entre
frères. La guerre est folle, son plan est la destruction, se
développer en détruisant. La cupidité, l’intolérance,
l’ambition du pouvoir sont certains des motifs qui poussent à
décider la guerre, et ces motifs sont souvent justifiés par une
idéologie. Mais d’abord il y a la passion, il y a une impulsion
déformée. L’idéologie est également une justification. Et
lorsqu'il n’y a pas d’idéologie, il y a la réponse de Caïn:
Que m’importe? Suis-je le gardien de mon frère? La guerre
n'épargne personne, personnes âgées, enfants, mamans, papas… Que
m’importe? Au dessus de ce cimetière, flotte la devise narquoise
de la guerre: Que m’importe? Tous les êtres humains qui reposent
ici avaient des projets et des rêves, mais leurs vies ont été
brisées. L’humanité a dit: Que m’importe? Pourquoi, pourquoi?
Aujourd’hui encore, après l'échec renouvelé d’une seconde
guerre mondiale, on peut, peut-être, parler d’une troisième
guerre par morceaux, avec des crimes, des massacres, des
destructions. La première page des journaux ne devrait-elle pas
avoir pour titre: Que m’importe? Aujourd'hui comme hier, l'attitude
de Caïn est exactement à l’opposé de ce que demande Jésus dans
l’Evangile. Lui qui est présent dans le plus petit de ses frères,
le Roi, le Juge du monde, il est l’affamé, l’assoiffé,
l’étranger, le malade, le prisonnier. Celui qui prend soin de son
frère entre dans la joie du Seigneur. Celui qui, en revanche, ne le
fait pas, qui par ses omissions dit Que m’importe?, reste dehors.
Ici
comme dans le cimetière voisin, sont enterrées beaucoup de
victimes. Nous les évoquons aujourd’hui. Il y a les pleurs, il y a
la douleur. Et d’ici nous rappelons toutes les victimes de toutes
les guerres. Aujourd’hui encore les victimes sont nombreuses.
Comment cela est-il possible? C’est possible parce que, aujourd’hui
encore, dans les coulisses, il y a des intérêts, des plans
géopolitiques, l’avidité de l’argent et du pouvoir, et il y a
l’industrie des armes, qui semble être tellement importante. Et
ces planificateurs de la terreur, ces organisateurs de
l’affrontement, comme également les marchands d’armes, ont écrit
dans leurs cœurs Que m’importe? C’est le propre des sages, que
de reconnaître leurs erreurs, d’en éprouver de la douleur, de les
regretter, de demander pardon et de pleurer. Avec ce Que m’importe?
qu’ont dans le cœur les affairistes de la guerre, peut être
gagnent-ils beaucoup, mais leur cœur corrompu a perdu la capacité
de pleurer. Caïn n’a pas pleuré, il n'a pu le faire. Et son ombre
de Caïn plane aujourd’hui sur ces cimetières. On le voit ici. On
le voit dans l’histoire qui va de 1914 jusqu’à nos jours. Et on
le voit aussi de nos jours. Avec un cœur de fils, de frère, de
père, je vous demande à tous, et pour nous tous, la conversion du
cœur: Passons de ce Que m’importe? aux larmes. Pour tous ceux qui
sont tombés dans une hécatombe inutile, pour toutes les victimes de
la folie de la guerre, en tout temps. Pleurer, l’humanité a besoin
de pleurer, et c’est maintenant l’heure des larmes".
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