Cité
du Vatican, le 4 septembre 2015 (VIS). Hier le Pape s'est adressé
par vidéo aux participants du Congrès international de théologie
qui s'achevait à Buenos Aires (''Vatican II, mémoire, présent et
perspectives''), organisé dans le cadre des commémorations du
centenaire de la Faculté de théologie de l'Université catholique
argentine et du cinquantième anniversaire de la clôture du Concile:
Il
s'agit, a dit le Saint-Père, "de faire le point sur la santé
d'une Eglise particulière, mais aussi de célébrer la vie,
l'histoire et la foi du Peuple de Dieu dans ce pays... Or aucune
Eglise ne peut vivre isolée ou croire être le propriétaire et
unique interprète de la réalité et de l'action de l'Esprit. Aucune
communauté n'a le monopole de l'interprétation ou de
l'inculturation. D'autre part, il ne saurait y avoir d'Eglise
universelle qui se détourne des réalités locales... Cela nous
conduit à comprendre qu'on est pas chrétien de la même
manière...en Inde, au Canada ou à Rome. La tâche majeure du
théologien est de discerner, de réfléchir sur ce qu'est être
chrétien aujourd'hui?... Pour répondre à cet enjeu, nous devons
surmonter deux tentations. La première est la condamnation.
L'expression familière Tout était mieux avant signifie se réfugier
dans le conservatisme ou le fondamentalisme, ou à l'inverse tout
sacraliser du passé, tout rejeter de la nouveauté, de relativiser
toute la sagesse nouvelle issue du patrimoine ecclésial. Pour
surmonter ces tentations, il faut user de la réflexion et du
discernement, prendre au sérieux la tradition ecclésiale et la
réalité, les faire dialoguer. On voit souvent une opposition entre
la théologie et la pastorale, comme si elles étaient opposés, des
réalités séparées et sans liens l'une avec l'autre... Générer
une fausse opposition entre la théologie et pastorale, entre croire
réflexion et vie chrétienne... Dépasser ce divorce a précisément
été l'une des contributions majeures de Vatican II. Comment oublier
les paroles de Jean XXIII à l'ouverture du Concile?: Une chose est
la substance de la doctrine, du dépôt de la foi, une autre la façon
de faire les formuler". Nous devons être attentifs "à
bien distinguer le message de son mode de transmission, selon les
schèmes culturels de chaque époque. Ne pas faire cet exercice de
discernement conduit à trahir le contenu du message ... Si cet
exercice théologique fait défaut, on a une mutilation de la
mission. La doctrine est pas, une dynamique privée et qui ne doit
pas soulever de questions et de doutes. Au contraire elle a un
visage, un corps appelé Jésus-Christ, une vie offerte de génération
en génération partout et à tous les hommes".
''Les
questions de notre peuple, ses détresses et combats, ses rêves et
préoccupations ont une valeur herméneutique nous ne pouvons ignorer
si nous prenons au sérieux le principe de l'incarnation... Nos
formulations de la foi sont nées de débats et de confrontations, au
contact de diverses cultures, communautés, peuples et contextes
historiques... Un chrétien devient suspect lorsqu'il est suspicieux.
Il doit accepter d'être critiqué par ses interlocuteurs. Les gens
comme les périphéries ne sont pas facultatifs, mais nécessaires à
une meilleure compréhension de la foi. Il est par conséquent
important de se demander à qui nous pensons quand nous faisons de la
théologie... N'oublions pas le Saint-Esprit qui habite les personnes
qui prient et qui est l'objet même de la théologie. Une théologie
née hors de lui peut revêtir un bel aspect. Mais elle sera sans
contenu. Permettez-moi de noter trois caractères pour l'identité du
théologien:
1.Le
théologien est d'abord un fils de son peuple. Il ne peut pas et ne
veut pas ignorer les siens. Il doit les rencontrer, parler leur
langue, connaître leurs racines, leur histoire et leurs traditions.
Il est l'homme qui apprend à apprécier ce qu'il reçoit comme signe
de la présence de Dieu, parce qu'il sait que la foi ne lui
appartient pas. Ceci l'amène à reconnaître que le peuple croyant
au sein duquel il est né, possède un sens théologique qu'il ne
doit pas ignorer.
2.Le
théologien est aussi un croyant, une personne qui a de l'expérience
de Jésus-Christ et a découvert qu'il ne peut vivre sans
lui....Théologien est celui qui sait ne pouvoir vivre sans l'objet
sujet de son amour et qui consacre sa vie à partager avec ses
frères.
3.Le
théologien est prophète. Un des plus grands défis dans le monde
d'aujourd'hui est non seulement la facilité avec laquelle on peut
oublier Dieu... La crise actuelle a pour coeur l'incapacité des gens
à croire en quoi que ce soit hors d'eux-mêmes... ce qui produit une
rupture dans les identités personnelles et sociales. Cette situation
engendre un processus d'aliénation par manque autant d'avenir que de
passé. Le théologien est prophète car il maintient vivante la
conscience du passé et anime l'invitation à aller de l'avant. Il
est capable aussi de dénoncer toutes les aliénations parce qu'il
détecte et réfléchit sur la tradition de l'Eglise comme sur
l'espérance à laquelle nous sommes tous appelés.
Par
conséquent, il y n'a qu'une façon de faire de la théologie, à
genoux. C'est là non seulement un acte de piété et de prière,
mais une méthode pour penser la théologie dans une réalité
dynamique entre penser et la prier. Une théologie à genoux
encourage à penser et prier en pensant".