Cité
du Vatican, 22 juillet 2015 (VIS). Le Pape François s'est adressé
hier après-midi aux participants à la rencontre sur l'esclavage
moderne, le changement climatique et l'engagement des villes pour le
développement durable, organisée par l'Académie pontificale des
sciences. Parmi eux les maires de plus de 60 grandes villes,des
administrateurs locaux et des représentants des Nations-Unies.
Le
Saint-Père a prononcé un discours improvisé dans lequel il a
réitéré que la protection de l'environnement signifie avant tout
une attitude de l'écologie humaine et que son encyclique Laudato Si'
n'était pas seulement verte mais sociale. Evoquant l'énorme
croissance des métropoles provoquée par l'affluence de populations
rurales ne trouvant plus de quoi vivre de l'agriculture, il a invité
les maires et les organisations internationales à prendre des
mesures sur l'exploitation et le trafic de personnes causés par
l'immigration. Parlant de la culture de la protection de
l'environnement, il a redit qu'il ne pouvait s'agir d'une simple
attitude de bon sens vert. ''C'est beaucoup plus. Prendre soin de
l'environnement signifie faire aussi de l'écologie humaine. En
d'autres termes, nous ne pouvons pas dire que la personne est séparée
de la création. L'écologie est un tout, qui comprend l'humain,
comme j'ai voulu le montrer dans Laudato Si'. On ne peut séparer
l'homme du reste car il existe un rapport d'impact mutuel avec
l'environnement... Laudato Si' ne constitue pas une encyclique verte
mais une encyclique sociale. Parce que dans le milieu social, la vie
sociale, on ne peut exclure le soin de l'environnement".
Expliquant que l'invitation de maires de grandes villes se justifie
par le fait qu'ils sont les témoins quotidiens de ce phénomène
mondial, le Saint-Père a évoqué des périphéries devenant "des
ceintures de pauvreté et de misère, où les gens souffrent des
effets de la négligence de l'environnement... Pourquoi tant de
personnes viennent dans les grandes villes, pour s'entasser dans les
bidonvilles et les favelas? ... Tout simplement parce que le monde
rural ne leur donne plus de perspectives". C'est pourquoi dans
l'encyclique "j'ai signalé l'idolâtrie de la technocratie. La
technocratie ôte le travail, crée le chômage qui ne cesse
d'augmenter... Je ne connais pas les statistiques, mais dans certains
pays européens, en particulier chez les jeunes est de 40 % voire de
50 % pour les plus âgés... Quel horizon, quel avenir pour eux? Que
reste-t-il à ces jeunes? Le désœuvrement ou la toxicomanie, sans
savoir quoi faire de la vie". Avec à ce point une vie vidée de
sens avec le suicide en perspective. "Les statistiques de
suicide chez les jeunes ne sont pas publiés dans leur totalité...
Alors pourquoi ne pas rechercher d'autres horizons comme la guérilla.
Un idéal de vie!''.
''D'autre
part, la santé est en jeu...car nombre de maladies rares sont
provoquées par les fertilisants agricoles... Parmi les grands enjeux
il y a aussi l'air et l'eau. Autrement dit, la désertification de
vastes zones à coup de déforestation... On dévaste l'Amazonie, qui
est le poumon du monde, mais aussi le Congo... Tout ceci est e
produit d'une modernisation excessive, qui ne prend pas soin de
l'environnement... Et puis nous avons les phénomènes naturels qui
poussent à la migration. Le manque de travail contraint souvent les
gens à travailler au noir, sans contrat. C'est désormais un vaste
phénomène qui fait qu'une personne ne gagne pas assez pour vivre.
Cela peut conduire à un comportement criminel et aux désordres
qu'on constate dans les grandes villes soumises à une migration
causée par la modernisation... Dans le secteur minier, l'esclavage
est encore très grand et très fort. Et puis l'utilisation de
certains éléments minéraux blanchiment comme l'arsenic et le
cyanure, provoque des maladies". En outre l'exploitation et "la
traite de la main-d'œuvre, conduisent aussi à la prostitution... Il
est nécessaire de faire appel à l'Organisation des Nations-Unies,
et je mets beaucoup d'espoir dans le sommet de Paris, qui devrait
aboutir à un accord fondamental. Je suis très optimiste, même"
s'il faut "être préoccupé, en particulier par le trafic
d'êtres humains causé par le phénomène environnemental et
l'exploitation des personnes. J'ai reçu il y a quelques mois une
délégation de femmes de l'ONU en charge de l'exploitation sexuelle
des enfants dans les pays en guerre. Oui les guerres sont également
un élément de déséquilibre de l'environnement".
"Je
conclurai par une réflexion du théologien et philosophe Romano
Guardini, qui parle de deux formes d'ignorance, l'ignorance que Dieu
nous a donné pour que nous la transformions en culture...et
l'ignorance de l'homme qui ne respecte pas la terre... Quand l'homme
ne se soucie pas d'elle, la nature se retourne contre lui...
L'énergie nucléaire n'est mauvaise, elle peut aider l'homme,
mais...pensons à Hiroshima et Nagasaki. Aujourd'hui cette deuxième
forme d'ignorance est celle qui détruit l'homme. Un rabbin du temps
de saint Thomas d'Aquin a expliqué la Tour de Babel en disant que sa
construction avait coûté beaucoup de temps et de travail, en
particulier la fabrication de briques... Quand une brique tombait
c'était grave, et le coupable était vivement puni. Quand un
travailleur qui construit rien, rien ne risque de tomber. Telle est
la seconde forme d'ignorance: L'homme créateur d'inculture et non de
culture", et en l'occurrence parce qu'il ne se soucie pas de
l'environnement. "J'ai fait appel à l'Académie pontificale des
sciences et à des maires de grandes villes parce qu'ils ont
connaissance de la question... Ils savent travailler en profonde, du
centre vers les périphéries... Ils ont conscience de la réalité
de l'humanité. Le Saint-Siège comme d'autres pourra faire un bon
discours à l'ONU, mais si le travail ne vient pas de la périphérie
vers le centre, cela n'aura aucun effet. D'où la responsabilité des
maires. Par conséquent, je leur suis très reconnaissant d'avoir
apporté leur éclairage de tant périphéries gravement touchées
par ces problèmes... Je vous remercie et demande au Seigneur de nous
donner à tous la grâce d'être plus conscients de la destruction
que nous causons en ne se souciant pas de l'écologie humaine...
Transformant donc l'ignorance en culture, et non le contraire".