Cité
du Vatican, 20 octobre (VIS). Au cours de la seizième congrégation
les pères synodaux ont entendu le témoignage de plusieurs Auditeurs
femmes. Le rôle des femmes dans la famille, la société et
l'Eglise, les différences culturelles, les préoccupations en
matière d'éthique et médecine, la situation des familles
chrétiennes, ainsi que la catéchèse familiale ont été abordés
dans ces interventions:
Mme.Agnes
Offiong Eroguyane, responsable de l'Organisation des femmes
catholiques au Nigeria a rappelé que les femmes africaines sont
connues pour leur soin des familles, avec ou sans la contribution de
leurs conjoints. Un rôle qui est encore plus fort depuis la menace
du groupe terroriste Boko Haram. "Les femmes redoublent leurs
efforts pour la survie de leurs familles... Sur la base de mon
expérience avec les femmes, en cette période difficile, je peux
dire avec fierté que si l'homme est le soutien de famille, la femme
en est le cœur. Quand le cœur cesse de battre la famille meurt,
parce que la fondation est ébranlée et la stabilité détruite. Au
Nigeria, les femmes catholiques ne sont pas seulement des
constructeurs de foyers, mais une force avec laquelle il faut compter
quand il s'agit de spiritualité, d'économie et de progrès de
l'Eglise."
Citant
l'Instrumentum Laboris où il est écrit que l'Eglise doit inculquer
aux familles un sentiment d'appartenance ecclésiale, qui n'exclue
aucun membre, Soeur Maureen Kelleher (USA) estime nécessaire
d'encourager toutes les capacités à réaliser un projet de vie au
service du Royaume de Dieu. Un appel est lancé à l'Eglise,
''relever le défi de diffuser dans la famille de l'Eglise un
sentiment du nous... Il faut encourager chaque personne, homme ou
femme, à développer ses compétences au service du Royaume. Je
demande aux dirigeants de l'Eglise de reconnaître que les femmes qui
se sentent appelés au service du Royaume ne trouvent pas leur place
dans notre Eglise. Malgré leurs grandes capacités elles ne peuvent
pas les mettre au service des décision et de la planification
pastorale... En 1974, lors du Synode sur l'évangélisation, une de
nos sœurs, Sœur Marguerite-Marie, était l'une des deux religieuses
désignés par l'Union des Supérieurs généraux. Aujourd'hui,
quartante ans plus tard, nous ne sommes que trois.''
L'Eglise
a grand besoin d'écouter les femmes, a déclaré Mme.Lucia
Scaraffia, professeur d'histoire contemporaine à l'Université de
Rome. "C'est dans l'écoute mutuelle que réside le véritable
discernement... Les femmes sont de grandes expertes des relations
familiales. Si nous quittons les théories abstraites, nous devons
apprendre d'elles comment jeter les bases d'une nouvelle famille, qui
soit ouverte au niveau des relations entre tous ses membres. Et non
plus sur la base de la disponibilité des femmes au sacrifice ou de
de leur capacité à assurer l'affection ou alimentation du foyer.
Comme si les mères, filles, grand-mères, épouses, qui sont au cœur
de la famille, ne faisaient pas partie de l'Eglise, de l'Eglise qui
embrasse le monde, pense et décide. Comme si il pouvait continuer,
même à l'égard de la famille prétendre qu'il n'y ait pas de
femmes. Comme si l'on pouvait continuer à ignorer leur existence
malgré la place révolutionnaire que Jésus a accordé aux femmes...
Si les familles sont très variées de par le monde, dans toutes les
femmes jouent le rôle plus important et le plus décisif pour
assurer la solidité et la durée de la famille. Quand nous parlons
de famille il ne faudrait pas uniquement prendre en compte le
mariage. Il y a un nombre croissant de familles avec une mère
célibataire et ses enfants. Ces femmes sont parfois malades ou
handicapés, ou ont subi une violence. Ces femmes, ces mères ont
rarement suivi des cours de théologie. Souvent elles ne sont même
pas mariés, mais donnent un merveilleux exemple de comportement
chrétien. Si vous, pères synodaux, ne leur prêtez pas attention
vous courrez le risque de les faire se sentir encore plus misérables,
parce que leur famille est très différente du modèle dont vous
débattez. Vous parlez peut-être trop d'une famille abstraite, d'une
famille parfaite qui n'existe pas, d'une famille qui n'a rien à voir
avec les familles réelles, celles que Jésus rencontrez. Si parfaite
cette famille semble ne pas avoir besoin de miséricorde, ni même
d'être soumise à examen."
La
question des mariages mixtes a été évoquée par le P.Garas Boulos
Garay Bishay, Curé de Notre Dame de la Paix à Sharm El Sheikh
(Egypte), qui a exprimé la préoccupation posée par un phénomène
socio-culturel répandu dans les zones touristiques. Ces mariages
mixtes se font entre femmes chrétiennes d'Europe ou de Russie avec
des hommes musulmans. Or la Sharia n'autorise que les hommes à
épouser des non musulmanes. "Ce phénomène, avec des
mouvements de population de masse et le nombre croissant de réfugiés
et les migrants a tendance à s'installer en Europe... Il aura
inévitablement une incidence sur l'Occident et mérite donc d'être
sérieusement considéré et traité. Ce sont des familles de double
appartenance culturelle et religieuse... Il ne faut pas oublier que
la loi islamique autorise la polygamie et le Coran oblige les parents
à l'éducation islamique des enfants... Il s'agit d'une
anthropologie culturelle et religieuse profondément différente qui
peut créer de graves crises au sein du couple, et rendre les
fractures irréparables notamment au dam des enfants.''
Mme.Maria
Harries, qui a oeuvré pendant quarante ans dans les services
sociaux catholiques australiens, a évoqué la condition des
aborigènes, souvent victimes d'abus sexuels de la part du clergé.
Ils sont largement marginalisés et divisés en de nombreux groupes
linguistiques et de traditions familiales diverses. "La plupart
d'entre eux est étrangère à l'idée de la famille, selon
l'enseignement de l'Eglise. Pour certains, le système matrilinéaire
signifie qu'ils ont beaucoup de mères. L'enfant grandit dans un
groupe de parenté, et non pas avec une mère et un père. Les femmes
jouent un rôle dynamique dans le monde des parents et attendent
qu'ils soient visibles... Tous les abus sexuels sont liés à l'abus
de pouvoir... La maltraitance des enfants dans les familles et les
institutions prouvent notre incapacité à répondre de manière
adéquate. L'attitude de l'Eglise en Australie et ailleurs a causé
une douleur très profonde... Avec le Pape François nous prions de
recevoir la grâce de la honte, afin de trouver des solutions
locales et des formules collectives pour répondre aux victimes et à
leurs familles. Nous devons écouter l'autre avec grande attention
profondément. Sur la base de nos échecs et de la souffrance qui les
accompagne il y a possibilité d'apprendre collectivement et
peut-être même doctrinalement, de se reconnecter et d'accompagner
des milliers de familles qui ont perdu confiance.''
Mme.Brenda
Kim Nayoug a parlé de ce que la Corée a appelé Génération Sampo,
les jeunes qui ignorent les fiançailles et le mariage et ne veulent
pas procréer. ''Beaucoup de jeunes ont abandonné ces trois choses à
cause des pressions sociales et des problèmes économiques. En
raison du chômage beaucoup renvoient leur mariage, oubliant que le
mariage est un appel de Dieu'' La vie est un long chemin au long
duquel peuvent surgir bien des obstacles... L'Eglise devrait s'ouvrir
et accompagner véritablement ces jeunes aux différents stades de
leur vie conjugale...en leur montrant la beauté de la famille
chrétienne".
Un
autre thème récurrent dans les interventions a été celui de la
sexualité et de l'éthique conjugale et médicale. Le pédiatre
péruvien Edgar Humberto Tejada Zeballos a dit: "Il y a des
couples qui croient qu'avoir un enfant est un droit, sans considérer
que les enfants sont un don de Dieu... Ainsi leurs choix, plus que
d'être une violation de la morale, risquent de coûter des vies
innocentes. Pensons à la fécondation in vitro, dont le processus
tue, détruit, congèle ou vend de nombreux embryons... On assiste
également à la maternité de substitution... Cette absence de
morale a pour conséquence qu'un grand nombre d'embryons est sacrifié
ou utilisé en laboratoire... Dans l'Instrumentum Laboris il faudrait
mentionner clairement ces menaces à la vie et la famille... Mais
aussi porter ces connaissances à de nombreux chrétiens qui
peut-être par ignorance commettent ces actes immoraux".
Patrizia
et Massimo Pasloni, un couple romain du Chemin néocatéchuménal,
avec douze enfants, actuellement en mission aux Pays-Bas, ont défini
ce pays une périphérie existentielle de l'Europe. Ayant exprimé
leur gratitude à l'encyclique de Paul VI Humanae Vitae, qui leur a
fait comprendre que ''la paternité responsable n'est pas de décider
du nombre d'enfants mais plutôt de prendre conscience de la grandeur
qu'il y a à collaborer avec Dieu dans la création... Tous les jours
nous voyons de grandes souffrances, des séparations, des
avortements, des personnes isolées et désespérées. Le monde
attend le témoignage de la famille chrétienne et nous sommes
convaincus que le salut de l'humanité passe par la famille
chrétienne... Nous faisons l'expérience de la communauté
chrétienne qui sauve la famille et de la famille qui sauve
l'Eglise.''
Soeur
Berta Maria Porras Fallas (Costa Rica) a insisté sur la nécessité
d'une formation comme réalisation de la vocation. Elle a proposé
trois priorités dans la pastorale des jeunes: D'abord, aimer avec
discernement, envisager la formation avec discernement et discerner
la mission, ensuite aborder l'amour du couple, homme et femme...
Troisièmement l'amour comme offrande sexuelle.''
Enfin,
le couple Marqus Odeesho, au nom des familles chrétiennes d'Irak, a
raconté comment les chrétiens de Ninive ont été contraints de
nuit à quitter leurs foyers, leurs emplois, leurs biens et leurs
écoles. ''Ce fut une expérience difficile, et seules nous ont
consolé les paroles de Jésus, Heureux ceux qui sont persécutés
pour la justice, pour le leur est le royaume des Cieux. Puis nous
avons commencé à entendre le témoignage d'autres familles
déplacées... Malgré leurs souffrances et la dureté de leur sort,
la proximité de l'Eglise les a aidés à éprouver leur foi...
Aujourd'hui des défis restent à relever face aux enlèvements et
aux attentats, aux pillages et à la terreur. Malgré ce il y a
encore de nombreuses familles engagées dans le pays et dans
l'Eglise, qui offrent un témoignage de foi et estiment que cette
persécution portera des fruits pour l'Eglise du Christ, comme ce fut
la cas dans l'Eglise primitive.''