Cité
du Vatican, 16 novembre 2015
(VIS). Hier après midi, le Saint-Père a rencontré la communauté
évangélique luthérienne de Rome à la Christuskirche, où il a été
chaleureusement accueilli par le Pasteur Jens-Martin Kruse, qui, dans
son discours de bienvenue, a aussi rappelé les visites de Jean-Paul
II et de Benoît XVI. Le Pape a répondu aux questions de trois
membres de la communauté, un enfant et deux femmes. Ensuite, après
les vêpres et la lecture d'un passage de Matthieu, il a prononcé
une homélie improvisée dans laquelle il a souligné que les
luthériens et les catholiques doivent se demander pardon
mutuellement pour les persécutions des uns contre les autres et pour
le scandale des divisions.
La
première question à laquelle le Pape a répondu, fut celle d'un
enfant qui voulait savoir ce qui lui plaisait le plus comme Pape. "ce
qui me plaît le plus sincèrement c'est d'être un prêtre, un
pasteur -a répondu le Saint-Père-... J'aime être Pape avec un
style de curé. Le service. Cela me plaît dans le sens où je m'y
sens bien, quand je visite les malades, quand je parle avec les
personnes qui sont un peu désespérées, tristes. J'aime beaucoup
aller dans les prisons... parler avec les prisonniers. Chaque fois
que je rentre dans une prison, je me demande: Pourquoi eux et pas
moi? Et là, je sens le salut de Jésus Christ, l'amour de Jésus
Christ pour moi. Parce que c'est lui qui m'a sauvé. Je ne suis pas
moins pécheur qu'eux, mais le Seigneur m'a pris par la main. Cela
aussi je le sens. Et quand je vais en prison, je suis heureux. Etre
Pape c'est être évêque, être prêtre, être pasteur. Si un Pape
n'agit pas comme un évêque, si un Pape n'agit pas comme un prêtre,
s'il n'agit pas comme un pasteur, il sera une personne très
intelligente, très importante, il aura beaucoup d'influence sur la
société, mais je pense...que dans son cœur, il ne sera pas
heureux".
La
deuxième question fut celle d'une luthérienne mariée à un
catholique qui regrettait de ne pouvoir participer avec son mari à
la Cène du Seigneur. "Ce n'est pas facile pour moi de répondre
-a dit le Pape-... Je pense à ce que le Seigneur nous a dit quand il
nous a donné ce commandement: Faites cela en mémoire de moi... La
Cène du Seigneur aura lieu, le banquet final de la Nouvelle
Jérusalem aura lieu... Toutefois, au long du chemin, je me demande,
et je ne sais pas comment répondre mais je fais mienne votre
question: Partager la Cène du Seigneur est la fin d'un chemin ou
c'est le viatique pour marcher ensemble? Je laisse la question aux
théologiens, à ceux qui comprennent. C'est vrai que dans un certain
sens, partager c'est dire qu'il n'y a pas de différence entre nous,
que nous avons la même doctrine... Mais n'avons-nous pas le même
baptême? Et si nous avons le même baptême, nous devons marcher
ensemble... Quand vous priez ensemble, ce baptême grandit, devient
fort. Quand vous enseignez à vos enfants qui est Jésus...faites de
même, dans la langue luthérienne et dans la langue catholique, mais
c'est la même chose. La question est: Et la Cène? Il y a des
questions auxquelles seulement si l'on est sincère avec soi-même et
avec le peu de lumières théologiques dont je dispose, on doit
répondre de même, voyez vous. Ceci est mon corps, ceci est mon
sang, a dit le Seigneur. Faites cela en mémoire de moi, et cela est
un viatique qui nous aide à marcher...Je réponds à votre question
par une autre: comment puis-je faire avec mon mari, pour que la Cène
du Seigneur m'accompagne sur ma route? C'est un problème auquel
chacun doit répondre. Mais un ami pasteur me disait: Nous croyons
que le Seigneur est présent là. Il est présent. Vous croyez que le
Seigneur est présent. Et quelle est la différence? Il y a des
explications, des interprétations. La vie est plus grande que les
explications et les interprétations. Vous faites toujours référence
au baptême: une foi, un baptême, un Seigneur, comme nous dit Paul,
et de là vous en assumez les conséquences. Je n'oserai jamais
donner un permis de faire cela, parce que cela ne relève pas de ma
compétence. Un baptême, un Seigneur, une foi. Parlez avec le
Seigneur et allez de l'avant. Je ne peux en dire plus".
La
dernière question, posée par la trésorière d'un projet d'aide aux
familles de réfugiés, demandait comment lutter contre la misère et
faire en sorte que les chrétiens ne la considèrent pas comme
inévitable ou, pire encore, n'érigent pas de nouveaux murs pour se
défendre de cette misère. "L'homme, dès le premier instant,
si nous lisons l'Ecriture, est un grand constructeur de murs qui
séparent de Dieu -a répondu le Pape-. Il y a de la fantaisie
derrière les murs humains, la fantaisie de devenir comme Dieu. Pour
moi, le mythe, pour le dire de façon technique, ou le récit de la
Tour de Babel, est l'attitude de l'homme et de la femme qui
construisent des murs, parce que construire un mur c'est dire: Nous
sommes les puissants, vous êtes dehors...Construire un mur est
exclure, cela va dans ce sens... Le mur est le monument de
l'exclusion. Nous aussi dans notre vie intérieure, combien de fois
les richesses, la vanité, l'orgueil deviennent un mur devant le
Seigneur, nous éloignent du Seigneur... Comment faire pour ne pas
faire de murs?Faire comme Jésus... se mettre à la place du
dernier... Avec cette œuvre de soutien aux jeunes mères, vous ne
faites pas de murs, vous rendez service.. L’égoïsme humain veut
se défendre, défendre son pouvoir, son égoïsme, mais en se
défendant ainsi on s'éloigne de la source de richesse. Les murs, à
la fin, sont comme un suicide. Ils t'enferment".
Après
quoi le Pape François a récité l'office des vêpres et prononcé
une brève homélie dans laquelle, citant l'évangile de Matthieu, il
a parlé des questions que Jésus nous posera au jour du jugement.
"Tu as été à la messe? Tu as fait une bonne catéchèse? Non.
Les questions seront sur les pauvres, parce que la pauvreté est au
centre de l'Evangile. Etant riche, il s'est fait pauvre pour nous
enrichir de sa pauvreté... C'est le choix du service. Jésus est
Dieu? C'est le Seigneur? C'est vrai. Mais c'est le serviteur, et le
choix se fera sur cela. As-tu consumé ta vie pour toi ou pour
servir? Pour te défendre des autres avec des murs ou pour les
accueillir avec amour? Ce sera le dernier choix de Jésus. Je me
demande: mais nous, luthériens et catholiques, de quel côté
serons-nous, à droite ou à gauche? Mais il y a eu de sombres
époques entre nous. Pensez aux persécutions... entre nous! Avec le
même baptême! Pensez à tous ces brûlés vifs. Nous devons nous
demander pardon de cela, du scandale de la division, parce que tous,
luthériens et catholiques, nous sommes dans ce choix, pas ailleurs,
le choix du service comme Lui nous l'a indiqué, le serviteur du
Seigneur. Pour conclure, quand je vois le Seigneur serviteur qui
sert, j'aime lui demander d'être le serviteur de l'unité, qu'il
nous aide à cheminer ensemble. Aujourd'hui, nous avons prié
ensemble. Prier ensemble, travailler ensemble pour les pauvres, pour
les nécessiteux. Nous aimer ensemble, d'un véritable amour de
frères. Mais Père, nous sommes différents parce que nos livres
dogmatiques disent une chose et les vôtres une autre. Mais un de vos
grands représentants a dit une fois qu'est arrivée l'heure de la
diversité réconciliée. Demandons aujourd'hui cette grâce, la
grâce de cette diversité réconciliée dans le Seigneur,
c'est-à-dire de Yahvé, de ce Dieu qui est venu parmi nous pour
servir et non pour être servi".
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