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mardi 16 décembre 2003

EDUQUER A LA PAIX, UN ENGAGEMENT TOUJOURS ACTUEL


CITE DU VATICAN, 16 DEC 2003 (VIS). Aujourd'hui a été rendu public le Message de Jean-Paul II pour la Journée mondiale de la Paix (1er janvier 2004), intitulé: "Un engagement toujours actuel, éduquer à la paix" (publié en allemand, anglais, espagnol, français, italien et portugais). Le document est adressé aux chefs d'état, qui ont pour devoir de promouvoir la paix, ainsi qu'aux juristes, éducateurs de la jeunesse, aux "hommes et femmes...tentés de recourir aux moyens inacceptables du terrorisme, compromettant ainsi à sa racine la cause pour laquelle" ils combattent.

Daté du 8 décembre, Solennité de l'Immaculée, le Message comporte dix chapitres, dont voici d'amples extraits:

"Une initiative conrète:

" Mon premier Message pour la Journée mondiale de la Paix, début janvier 1979, était centré sur le thème: 'Pour parvenir à la paix, éduquer à la paix'... Paul VI...avait souhaité que, le 1er janvier de chaque année, soit célébrée une Journée mondiale de prière pour la Paix "

" Au cours des vingt-cinq ans de pontificat que le Seigneur m'a accordés jusqu'ici, je n'ai pas cessé de faire entendre ma voix, devant l'Eglise et devant le monde, pour inviter les croyants, ainsi que tous les hommes de bonne volonté, à faire leur la cause de la paix, pour contribuer à mettre en œuvre ce bien primordial, assurant ainsi au monde des temps meilleurs, dans une convivialité sereine et dans un respect réciproque... L'humanité en effet, ébranlée comme elle l'est par l'égoïsme et par la haine, par la soif de puissance et par le désir de vengeance, a plus que jamais besoin de retrouver le chemin de la concorde ".
" La science de la paix:
Les onze Messages adressés au monde par le Pape Paul VI ont progressivement balisé le chemin à accomplir pour parvenir à l'idéal de la paix... Bien plus, face au drame des guerres qui, au début du troisième millénaire, ensanglantent encore certaines régions du monde, surtout au Moyen-Orient, ces écrits, dans certains de leurs passages, prennent la valeur d'avertissements prophétiques ".
" Le lexique de la paix:
Pour ma part, j'ai cherché à poursuivre le chemin tracé par mon vénéré prédécesseur ".
" C'est ainsi qu'est née une synthèse de la doctrine sur la paix, une sorte de lexique concernant ce sujet fondamental: un lexique simple à comprendre pour qui a l'esprit bien disposé, mais en même temps extrêmement exigeant pour toute personne sensible au sort de l'humanité ".
" Nous chrétiens, nous ressentons l'engagement à nous éduquer nous-mêmes, ainsi que les autres, à la paix comme faisant partie du génie même de notre religion. Pour le chrétien, en effet, proclamer la paix c'est annoncer le Christ qui est notre paix , c'est annoncer son Evangile, qui est l'Evangile de la paix, c'est appeler tous les hommes à vivre la béatitude invitant à être des artisans de paix ".
" L'éducation à la paix :
Dans le Message pour la Journée mondiale de la Paix du 1er janvier 1979, je lançais déjà cet appel: 'Pour parvenir à la paix, éduquer à la paix'. Cela est aujourd'hui plus urgent que jamais, car les hommes, devant les tragédies qui continuent d'affliger l'humanité, sont tentés de céder au fatalisme, comme si la paix était un idéal inaccessible ".
" la paix est possible...la paix est un devoir. Cette dernière doit être construite sur les quatre piliers indiqués par le Bienheureux Jean XXIII dans l'encyclique Pacem in Terris, c'est-à-dire sur la vérité, la justice, l'amour et la liberté ".
" L'éducation à la légalité:
Dans ce devoir d'éducation à la paix, s'inscrit avec une particulière urgence la nécessité de conduire les individus et les peuples à respecter l'ordre international et à observer les engagements pris par les autorités qui les représentent légitimement ".
" Depuis le début de la civilisation, les regroupements humains, qui se constituaient peu à peu, eurent soin d'établir des ententes et des pactes afin d'éviter l'usage arbitraire de la force et d'ouvrir la voie à une solution pacifique des controverses surgissant au fil du temps. A côté des ordonnancements juridiques propres aux différents peuples, se constitua ainsi progressivement un autre ensemble de normes, qui fut qualifié du nom de Jus Gentium (droit des peuples). Avec le temps, ce dernier s'est précisé et affiné à la lumière des évolutions historiques des divers peuples ".
" A partir du XVI siècle, juristes, philosophes et théologiens s'engagèrent dans l'élaboration de différents chapitres du droit international, l'enracinant dans des postulats fondamentaux du droit naturel. Au cours de cette évolution, ont pris forme, d'une manière de plus en plus forte et avec un développement croissant, des principes universels, qui sont antérieurs et supérieurs au droit interne des états "
" Entre tous, le principe assurément central est le suivant: Pacta Sunt Servanda, à savoir les accords librement souscrits doivent être honorés. C'est là le point fondamental et le présupposé incontournable de tout rapport entre des parties contractantes responsables. Sa violation ne peut qu'engendrer une situation d'illégalité d'où s'ensuivraient des désaccords et des oppositions qui ne manqueraient pas d'avoir des répercussions négatives durables. Il est donc opportun de rappeler cette règle fondamentale, surtout dans les moments où l'on perçoit la tentation de recourir au droit de la force plutôt qu'à la force du droit ".
" L'observance du droit:
La seconde guerre mondiale, "avec les horreurs et les terrifiantes violations de la dignité de l'homme qu'elle provoqua, conduisit à un profond renouvellement de l'ordre juridique international... Pour veiller à la paix et à la sécurité mondiales, pour encourager les efforts des états au maintien et à la garantie de ces biens fondamentaux de l'humanité, une organisation a été créée, constituée spécialement à cet effet - l'Organisation des Nations Unies - avec un Conseil de Sécurité investi de larges pouvoirs d'action. L'interdiction du recours à la force a été établie comme axe central du système; interdiction qui, selon le chapitre VII, bien connu, de la Charte des Nations-Unies, prévoit deux seules exceptions. La première confirme le droit naturel à la légitime défense, qui doit s'exercer selon les modalités prévues et dans le cadre des nations unies: par conséquent, également dans les limites traditionnelles de la nécessité et de la proportionnalité ".
" L'autre exception concerne le système de sécurité collective, qui attribue au Conseil de Sécurité la compétence et la responsabilité en matière de maintien de la paix, avec les pouvoirs de décision et une grande faculté discrétionnaire ".
" Un nouvel ordre international :
Il faut toutefois reconnaître que l'Organisation des Nations-Unies, même avec des limites et des retards liés pour une grande part à des défaillances de ses membres, a contribué notablement à promouvoir le respect de la dignité humaine, la liberté des peuples et l'exigence du développement, préparant ainsi le terrain culturel et institutionnel sur lequel peut être édifiée la paix ".
" Les idéaux des Nations-Unies sont largement répandus, en particulier à travers les gestes concrets de solidarité et de paix, accomplis par tant de personnes qui œuvrent au sein des Organisations non gouvernementales et dans les Mouvements pour les Droits de l'Homme ".
" Cela représente une incitation significative pour entreprendre une réforme qui mette l'ONU en mesure de fonctionner de manière efficace afin d'atteindre ses fins statutaires, toujours valables: 'Affrontant une période nouvelle et plus difficile de son développement authentique, l'humanité a besoin aujourd'hui d'un degré supérieur d'organisation à l'échelle internationale' ".
" La plaie funeste du terrorisme:
Le droit international a aujourd'hui du mal à offrir des solutions aux situations conflictuelles découlant des transformations de la physionomie du monde contemporain. En effet, ces situations conflictuelles ont souvent parmi leurs protagonistes des acteurs qui ne sont pas des états, mais des groupements issus de la désagrégation des états, ou liés à des revendications indépendantistes ou associés à des organisations criminelles structurées. L'ordre juridique, constitué de normes élaborées tout au long des siècles pour réguler les rapports entre états souverains, a du mal à faire face à des conflits dans lesquels agissent également des organisations qui ne peuvent être identifiées aux caractéristiques traditionnelles du concept d'état. Ceci vaut, en particulier, dans le cas de groupes terroristes ".
" La plaie du terrorisme est devenue ces dernières années plus virulente et elle a produit d'atroces massacres, ".
" Toutefois, pour être victorieuse, la lutte contre le terrorisme ne peut se limiter seulement à des opérations répressives et punitives. Il est essentiel que le recours à la force, s'il est nécessaire, soit accompagné d'une analyse courageuse et lucide des motivations sous-jacentes aux attaques terroristes. En même temps, la lutte contre le terrorisme doit aussi être menée sur le plan politique et pédagogique: d'un côté, en supprimant les causes qui sont à l'origine de situations d'injustice qui incitent souvent aux actes les plus désespérés et les plus sanguinaires; de l'autre, en insistant sur une éducation inspirée du respect de la vie humaine en toute circonstance ".
" Dans la nécessaire lutte contre le terrorisme, le droit international est désormais appelé à élaborer des instruments juridiques dotés d'efficaces mécanismes de prévention, de surveillance et de répression de la criminalité. Dans tous les cas, les gouvernements démocratiques savent bien que l'usage de la force contre les terroristes ne peut justifier le renoncement aux principes d'un état de droit. Des choix politiques qui rechercheraient le succès sans tenir compte des droits fondamentaux de l'homme seraient inacceptables, car la fin ne justifie jamais les moyens ".
" La contribution de l'Eglise:
Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu! ... C'est bien pour cela que l'annonce du salut, que l'Eglise répand dans le monde, contient des éléments doctrinaux d'une importance fondamentale pour l'élaboration des principes nécessaires à une coexistence pacifique entre les nations ".
" Le droit international doit éviter que prévale la loi du plus fort. Son but essentiel est qu'à 'la force matérielle des armes soit substituée la force morale du droit', prévoyant des sanctions appropriées contre les transgresseurs, ainsi que des réparations adaptées pour les victimes. Cela doit également valoir pour les gouvernants qui violent impunément la dignité et les droits de l'homme, sous le prétexte inacceptable qu'il s'agit de questions internes à leur état ".
" En m'adressant au Corps Diplomatique accrédité près le Saint-Siège, le 13 janvier 1997, je relevais que...la morale doit féconder le droit; elle peut même exercer une fonction d'anticipation sur le droit, dans la mesure où elle lui indique la direction de ce qui est juste et bien ".
"On note l'importance de la contribution doctrinale proposée par l'Eglise au cours des siècles, grâce à la réflexion philosophique et théologique de nombreux penseurs chrétiens, pour orienter le droit international vers le bien commun de la famille humaine tout entière ".
" La civilisation de l'amour:
Au terme de ces réflexions, j'estime toutefois de mon devoir de rappeler que, pour l'établissement d'une paix véritable dans le monde, la justice doit trouver son complément dans la charité... Ils ne sont que les deux faces d'une même réalité, les deux dimensions de l'existence humaine qui doivent se compléter mutuellement. L'expérience historique nous le confirme... Seule, la justice ne suffit pas. Elle peut même en arriver à se nier elle-même, si elle ne s'ouvre pas à cette force plus profonde qu'est l'amour ".
" C'est pour cela que, plus d'une fois, j'ai rappelé aux chrétiens et à toutes les personnes de bonne volonté la nécessité du pardon pour résoudre les problèmes entre les personnes comme entre les peuples. Il n'y a pas de paix sans pardon! Et je le répète encore en cette circonstance, alors que j'ai en particulier sous les yeux la crise qui continue à se déchaîner en Palestine et au Moyen-Orient: une solution aux très graves problèmes dont souffrent depuis trop longtemps les populations de ces régions ne pourra pas être trouvée tant que l'on ne se décidera pas à dépasser la logique de la simple justice pour s'ouvrir aussi à celle du pardon ".
" Le chrétien le sait: l'amour est la raison qui fait que Dieu entre en relation avec l'homme...L'amour est...la forme la plus haute et la plus noble de relation des êtres humains entre eux aussi. L'amour devra donc animer tous les secteurs de la vie humaine et s'étendre également à l'ordre international. Seule une humanité dans laquelle règne la civilisation de l'amour pourra jouir d'une paix authentique et durable ".
MESS/JOURNEE PAIX 2004/... VIS 20031216 (2060)

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