Cité
du Vatican, 27 janvier 2015 (VIS). Ce matin près la Salle de Presse,
Mgr.Giampietro Dal Toso, Secrétaire du Conseil pontifical Cor Unum,
a présenté le Message du Pape pour le prochain Carême qui traite
de l’indifférence: Dans diverses occasions, a-t-il dit, il a déjà
abordé le thème de la globalisation de l’indifférence, tandis que
le Secrétaire d’Etat évoquait à l’ONU le danger d’une
indifférence généralisée, assimilé à une apathie qui parfois
est synonyme d’irresponsabilité. "Il s’agit donc d’un
concept important pour éclairer les différents phénomènes du
monde moderne, concept que nous pouvons essayer de comprendre en
l’insérant dans une lecture, certainement partielle, d’une
certaine culture. L’indifférence vient d’une absence de
différence. D’une non-considération de la différence. Ceci peut
être observé au moins à trois niveaux. C’est au niveau des
relations inter-personnelles, que ce jeu entre différence et
indifférence peut être le plus facilement compréhensible. D’un
côté on insiste beaucoup sur la différence pour provoquer une
division. D’un autre coté le manque d’attention à la différence
qui existe entre moi et l’autre, aplatit l’autre sur mes propres
caractéristiques et l’efface. Au niveau culturel, dans l’air du
temps qui contribue à forger notre façon de penser et de juger, il
me semble remarquer une indifférence vis-à-vis des valeurs. Il ne
s’agit pas seulement d’une méconnaissance des valeurs ou d’une
lacune dans leur observance, mais principalement d’une absence de
jugement sur celles-ci. De sorte que tout choix devient
interchangeable, toute hypothèse peut être parcourue, et qu’ainsi
toute évaluation du bien ou du mal, du vrai ou du faux, devient
inutile. Car s’il n’y a pas de différence, tout devient
équivalent, et par conséquent personne n’a le droit de proposer
ce qui est plus connaturel ou moins connaturel à la personne.
L’homologation globale, le nivellement des valeurs causé par
l’absence de différence est lié à l’expérience du manque de
sens que font nombreux de nos contemporains. Si tout se vaut, si rien
n’est différent et donc qu’il n’existe rien qui vaille la
peine, en vue de quoi alors peut-on engager sa vie? Si tout est
équivalent, alors rien n’a vraiment de valeur et donc rien non
plus, ne mérite pleinement mon don.
Nous
avons atteint un troisième niveau, celui qui concerne plus
proprement les principes, celui métaphysique. Il y a à ce stade la
plus grande indifférence, la forme la plus forte, la plus
déterminante de manque d’attention à la différence qui s’appelle
indifférence à Dieu et qui implique un manque d’attention à la
différence entre Créateur et créature, ce qui fait tant de mal à
l’homme, car elle l’induit à se prendre pour Dieu, alors qu’il
se heurte constamment à ses limites. Je voudrais donc lire la
globalisation de l’indifférence non seulement comme un phénomène
géographique mais aussi comme un phénomène culturel qui se propage
d’autant plus que se développe une certaine vision occidentale du
monde, consistant à l'envisager non seulement en tant que phénomène
qui touche aux relations personnelles, mais aussi en tant qu’attitude
existentielle. L’Eglise ne dénonce pas certains situations
simplement pour les stigmatiser mais pour offrir également des voies
de guérison. C’est pourquoi le temps de carême est toujours un
temps de conversion, c’est-à-dire un temps de changement et de
renouvellement pour dépasser cette globalisation de l’indifférence
et entrer dans une nouvelle phase où nous reconnaissons la
différence qui existe entre nous-mêmes et l’autre, entre un style
de vie et un autre, entre soi et Dieu. Ce message de Carême propose
trois espaces où dépasser l’indifférence: L’Eglise, la
communauté et la personne singulière. Je voudrais commenter
rapidement ces trois niveaux en partant de la personne particulière.
Le
Pape François parle de la nécessité de la conversion et du cœur
nouveau qui peut battre en chacun de nous. Le chemin fondamental de
toute reconstruction sociale et de tout renouvellement culturel passe
par la conversion personnelle de chacun. Et l’Evangile nous donne
les clefs pour vraiment effectuer ce changement personnel, changement
qui a, par la suite, un impact sur tout le tissus social. Toutefois
il faut faire attention car la conversion ne trouve pas sa finalité
dans une société meilleure, mais elle a pour fin la connaissance du
Christ, et lui devenir semblable. Comme nous le voyons bien dans son
magistère, le Pape nous appelle à dépasser une foi qui n’est
qu’au service de soi-même et du propre bien-être. L’indifférence
naît d’une attitude existentielle où l’altérité n’est pas
constitutive de différence, ce qui conduit la personne à s’enfermer
sur elle-même. Même la foi peut devenir un outil au service de
cette recherche de soi. Le parcours consiste à aller outre, à
sortir de soi, à vivre la foi en regardant le Christ, et en Lui nous
découvrons le Père et des frères qui nous attendent. C’est dans
ce sens, que s’insère, par exemple, l’initiative promue par le
Conseil pontifical pour la nouvelle évangélisation, 24 heures pour
le Seigneur. Mais c’est toute la période du carême qui est offert
au fidèle pour qu’il se renouvelle intérieurement afin que le
mystère pascal du Christ mort et ressuscité se reproduise en lui.
La
deuxième exhortation concerne nos communautés chrétiennes qui sont
appelées à devenir des îles de miséricorde dans un monde dominé
par la globalisation de l’indifférence. Il y a donc une
distinction entre l’Eglise et le monde, la cité céleste et la
cité terrestre, et celle-ci doit apparaître toujours davantage. Il
s’agit de transformer nos espaces chrétiens paroisses communautés
et groupes en des lieux où se manifeste la miséricorde de Dieu.
D’aucuns pourraient se décourager face à la globalisation de
l’indifférence, parce qu’il semble que rien ne puisse changer
étant donné que nous sommes au sein d’un énorme processus social
et économique qui nous dépasse. Eh bien, non, la communauté
ecclésiale peut dès à présent vivre en dépassant l’indifférence,
elle peut déjà montrer au monde que l’on peut vivre différemment,
qu’elle peut déjà être cette cité sur la montagne dont parle
l’Evangile. A partir de ce carême, la vie chrétienne en
communauté, où chacun vit pour l’autre, peut devenir autre chose
qu’une chimère, elle peut être une réalité vécue, autre chose
qu’un beau rêve, elle peut être le signe vivant de la présence
de la miséricorde de Dieu en Christ.
Le
troisième niveau concerne l’Eglise dans sa réalité globale.
Malheureusement on a tendance à ne considérer l’Eglise que comme
une institution, une structure. Elle est au contraire le corps vivant
de ceux qui croient en Jésus-Christ. C’est cette totalité qui
doit être renouvelée. Parce qu’elle est un corps, elle montre
précisément sa vitalité par son changement, sa croissance, son
développement. Dans ce corps les membres prennent soin les uns des
autres, ou mieux, ils vivent les uns grâce aux autres. Vivre en
Eglise est déjà en soi une rupture avec l’individualisme, avec
l’indifférence, avec l’enfermement sur soi qui conduit à la
mort. En ce qui nous concerne, Cor Unum a toujours été l’instrument
de la proximité du Saint Père envers les plus délaissés. Je
voudrais l’illustrer avec trois exemples. Tout récemment comme
vous le savez, nous avons réuni, avec la Commission pontificale pour
l’Amérique latine, les différents organismes qui œuvrent en
Haïti. Ces cinq dernières années, l’Eglise catholique a dépensé
21,5 millions de US$ pour financer des projets de reconstruction dans
le pays. Par ailleurs nous continuons à garder une vigilance
spéciale sur la crise qui s’est développée au Moyen Orient, plus
particulièrement en Irak et en Syrie et où les grandes victimes de
cette guerre sont les populations civiles, plus spécialement les
minorités les plus faibles comme celles formées par les chrétiens.
Ces minorités sont devenues des jouets dans les mains des puissants.
Le Pape est revenu d’un voyage aux Philippines où l’on a pu voir
concrètement ce que signifie tenir ferme, raffermir les cœurs
lorsqu’il n’y a plus d’espoir. Dans la ville de Tacloban, où
le Pape s’est rendu, Cor Unum a construit un grand centre
d’assistance pour les jeunes et les personnes âgées qui porte le
nom du Pape François. Notre dicastère monter combien l’Eglise est
un corps où chaque membre peut faire l’expérience de la charité".
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