Cité
du Vatican, 26 mai 2014
(VIS). Après la cérémonie de bienvenue à l'aéroport de Tel Aviv,
le Pape s'est rendu en hélicoptère à Jérusalem pour rencontrer à
la délégation apostolique le Patriarche oecuménique de
Constantinople SS Barthélémy accompagné de trois hauts
dignitaires. Ont assisté à la rencontre le Cardinal Pietro Parolin,
Secrétaire d'Etat, et le Cardinal Kurt Koch, Président du Conseil
pontifical pour l'unité des chrétiens. Le Patriarche a été élu
en 1991, 270 Archevêque de Constantinople et Patriarche oecuménique
(orthodoxie). Il a rencontré Benoît XVI au Vatican en 2008 et
participé à la célébration du deuxième millénaire de la
naissance de saint Paul. Le 19 mars 2013, il a assisté à la messe
d'intronisation du Pape François. Ce fut la première fois, depuis
le grand schisme de 1054, qu'un patriarche orthodoxe participait à
la cérémonie d'inauguration de pontificat d'un pape catholique. Au
terme de leur rencontre, le Pape François et le Patriarche
Barthélémy ont signé la déclaration conjointe suivante:
1.Comme
nos vénérables prédécesseurs, le Pape Paul VI et le Patriarche
oecuménique Athénagoras, qui se sont rencontrés ici à Jérusalem,
il y a cinquante ans, nous aussi, le Pape François et le Patriarche
Barthélémy, nous étions déterminés à nous rencontrer en Terre
Sainte où notre commun Rédempteur, le Christ Notre-Seigneur, a
vécu, a enseigné, est mort, est ressuscité et monté au ciel, d’où
il a envoyé le Saint Esprit sur l’Eglise naissante (communiqué
commun du 6 janvier 1964). Notre nouvelle rencontre, entre les
Evêques des Eglises de Rome et de Constantinople, fondées
respectivement par les deux frères, les apôtres Pierre et André,
est pour nous source d’une profonde joie spirituelle. Elle offre
une occasion providentielle pour réfléchir sur la profondeur et sur
l’authenticité des liens existant entre nous, qui sont les fruits
d’un parcours rempli de grâce au long duquel le Seigneur nous a
conduits, depuis ce jour béni d’il y a cinquante ans.
2.Notre
rencontre fraternelle, aujourd’hui, est une nouvelle et nécessaire
étape sur la route de l’unité à laquelle seul l’Esprit Saint
peut nous conduire, celle de la communion dans une légitime
diversité. Nous nous rappelons, avec une profonde gratitude, les
étapes que le Seigneur nous a déjà rendus capables d’entreprendre.
L’accolade échangée entre le Pape Paul VI et le Patriarche
Athénagoras, ici, à Jérusalem, après tant de siècles de
silence, a préparé le chemin pour un geste important, le retrait de
la mémoire et du sein de l’Eglise des actes d’excommunication
mutuelle en 1054. Ce geste a été suivi par un échange de visites
entre les Sièges respectifs de Rome et de Constantinople, par une
correspondance régulière et, plus tard, par la décision, annoncée
par le Pape Jean-Paul II et le Patriarche Dimitrios, tous deux
d’heureuse mémoire, d’initier un dialogue théologique en vérité
entre catholiques et orthodoxes. Tout au long de ces années, Dieu,
source de toute paix et de tout amour, nous a enseignés à nous
regarder les uns les autres comme membres de la même famille
chrétienne, sous un seul Seigneur et Sauveur, Jésus Christ, et à
nous aimer les uns les autres, de sorte que nous puissions professer
notre foi au même Evangile du Christ, tel qu’il fut reçu par les
apôtres, exprimé et transmis à nous par les conciles œcuméniques
ainsi que par les pères de l’Eglise. Tandis que nous sommes
conscients de ne pas avoir atteint l’objectif de la pleine
communion, aujourd’hui, nous confirmons notre engagement à
continuer de marcher ensemble vers l’unité pour laquelle le Christ
notre Seigneur a prié le Père afin que tous soient un.
3.Bien
conscients que l’unité est manifestée dans l’amour de Dieu et
dans l’amour du prochain, nous attendons avec impatience ce jour
où, finalement, nous partagerons ensemble le banquet eucharistique.
Comme chrétiens, nous sommes appelés à nous préparer à recevoir
ce don de la communion eucharistique, selon l’enseignement de Saint
Irénée de Lyon, par la confession de la même foi, une prière
persévérante, une conversion intérieure, une vie renouvelée et un
dialogue fraternel. En atteignant ce but espéré, nous manifesterons
au monde l’amour de Dieu par lequel nous sommes reconnus comme de
vrais disciples de Jésus-Christ.
4.A
cette fin, le dialogue théologique entrepris par la Commission mixte
internationale offre une contribution fondamentale à la recherche
pour la pleine communion entre catholiques et orthodoxes. Ensuite,
sous les papes Jean-Paul II et Benoît XVI, et le Patriarche
Dimitrios, les progrès de nos rencontres théologiques ont été
substantiels. Aujourd’hui, nous exprimons notre sincère
appréciation pour les acquis, tout comme pour les efforts en cours.
Ceux-ci ne sont pas un pur exercice théorique, mais un exercice dans
la vérité et dans l’amour qui exige une connaissance toujours
plus profonde des traditions de l’autre pour les comprendre et pour
apprendre à partir d’elles. Ainsi, nous affirmons une fois encore
que le dialogue théologique ne recherche pas le plus petit
dénominateur commun sur lequel aboutir à un compromis, mais qu’il
est plutôt destiné à approfondir la compréhension de la vérité
tout entière que le Christ a donnée à son Eglise, une vérité que
nous ne cessons jamais de mieux comprendre lorsque nous suivons les
impulsions de l’Esprit Saint. Par conséquent, nous affirmons
ensemble que notre fidélité au Seigneur exige une rencontre
fraternelle et un dialogue vrai. Une telle quête ne nous éloigne
pas de la vérité. Tout au contraire, à travers un échange de
dons, sous la conduite de l’Esprit Saint, elle nous mènera à la
vérité tout entière.
5.Cependant,
même en faisant ensemble cette route vers la pleine communion, nous
avons maintenant le devoir d’offrir le témoignage commun de
l’amour de Dieu envers tous, en travaillant ensemble au service de
l’humanité, spécialement en défendant la dignité de la personne
humaine à toutes les étapes de la vie et la sainteté de la famille
basée sur le mariage, en promouvant la paix et le bien commun, et en
répondant à la souffrance qui continue d’affliger notre monde.
Nous reconnaissons que la faim, la pauvreté, l’analphabétisme,
l’inéquitable distribution des ressources doivent constamment être
affrontés. C’est notre devoir de chercher à construire une
société juste et humaine dans laquelle personne ne se sente exclu
ou marginalisé.
6.C’est
notre profonde conviction que l’avenir de la famille humaine dépend
aussi de la façon dont nous sauvegardons, avec prudence et
compassion, avec justice et équité, le don de la création que
notre Créateur nous a confié. Par conséquent, nous regrettons le
mauvais traitement abusif de notre planète, qui est un péché aux
yeux de Dieu. Nous réaffirmons notre responsabilité et notre
obligation d’encourager un sens de l’humilité et de la
modération, de sorte que tous sentent la nécessité de respecter la
création et de la sauvegarder avec soin. Ensemble, nous réaffirmons
notre engagement à sensibiliser au sujet de la gestion de la
création; nous appelons tous les hommes de bonne volonté à
considérer les manières de vivre plus sobrement, avec moins de
gaspillage, manifestant moins d’avidité et plus de générosité
pour la protection du monde de Dieu et pour le bénéfice de son
peuple.
7.De
même, il y a une nécessité urgente pour une coopération effective
et engagée des chrétiens en vue de sauvegarder partout le droit
d’exprimer publiquement sa foi, et d’être traité équitablement
lorsqu’on promeut ce que le christianisme continue d’offrir à la
société et à la culture contemporaines. A ce propos, nous invitons
tous les chrétiens à promouvoir un authentique dialogue avec le
judaïsme, l’islam et d’autres traditions religieuses.
L’indifférence et l’ignorance mutuelles ne peuvent que conduire
à la méfiance, voire, malheureusement, au conflit.
8.De
cette sainte ville de Jérusalem, nous exprimons nos profondes
préoccupations partagées pour la situation des chrétiens au Proche
et Moyen Orient et pour leur droit de rester des citoyens à part
entière de leurs patries. Avec confiance, nous nous tournons vers le
Dieu tout-puissant et miséricordieux, dans une prière pour la paix
en Terre Sainte et au Moyen Orient en général. Nous prions
spécialement pour les Eglises en Egypte, en Syrie et en Irak, qui
ont souffert le plus douloureusement en raison des récents
événements. Nous encourageons toutes les parties, indépendamment
de leurs convictions religieuses, à continuer d’œuvrer pour la
réconciliation et pour la juste reconnaissance des droits des
peuples. Nous sommes persuadés que ce ne sont pas les armes, mais le
dialogue, le pardon et la réconciliation qui sont les seuls moyens
possibles pour obtenir la paix.
9.Dans
un contexte historique marqué par la violence, l’indifférence et
l’égoïsme, beaucoup d’hommes et de femmes sentent aujourd’hui
qu’ils ont perdu leurs repères. C’est précisément à travers
notre témoignage commun de la bonne nouvelle de l’Evangile que
nous pouvons être capables d’aider nos contemporains à
redécouvrir la voie qui conduit à la vérité, à la justice et à
la paix. Unis dans nos intentions, et nous rappelant l’exemple, il
y a cinquante ans, du Pape Paul VI et du Patriarche Athénagoras,
nous lançons un appel à tous les chrétiens, ainsi qu’aux
croyants de toutes les traditions religieuses et à tous les hommes
de bonne volonté, à reconnaître l’urgence de l’heure qui nous
oblige à chercher la réconciliation et l’unité de la famille
humaine, tout en respectant pleinement les différences légitimes,
pour le bien de toute l’humanité et des générations futures.
10.En
entreprenant ce pèlerinage commun à l’endroit où notre unique et
même Seigneur Jésus Christ a été crucifié, a été enseveli et
est ressuscité, nous recommandons humblement à l’intercession de
la Très Sainte et toujours Vierge Marie nos futurs pas sur le chemin
vers la plénitude de l’unité, en confiant l’entière famille
humaine à l’amour infini de Dieu.
Que
le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il se penche vers
toi! Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte
la paix! De Jérusalem, le 25 mai 2014.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire